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de toutes sortes sur le petit monde : argent sous tous les noms, sous toutes les formes, sous tous les prétextes tel était le seul mobile, la seul but, la seule grandeur, la seule joie et le seul génie de Henri, petit-fils du grand Condé de la Réforme et père du grand Condé de la Fronde.

Deux grands Condés bien ambitieux et bien coupables aussi envers la France, on le sait ! mais capables aussi de lui rendre de grands services contre l’étranger, quand leur intérêt personnel ne les en détournait pas. Hélas ! c’est là l’affreux XVIIe siècle. Mais ils avaient de la bravoure, de la grandeur, de l’héroïsme quand même ; et celui qui joue un rôle dans notre récit n’était qu’avare, rusé, prudent, et l’on dit même quelque chose de pis.

Sa naissance avait été tragique, et sa jeunesse malheureuse.

Il avait reçu le jour en prison, d’une veuve accusée d’avoir empoisonné son mari[1]. Marié lui-même fort jeune à la belle Charlotte de Montmorency, fille du connétable, il avait eu pour rival le trop vert et trop vieux galant Henri IV. La jeune princesse avait été coquette. Le prince avait enlevé sa femme. On accusa le roi de vouloir faire la guerre à la Belgique pour lui avoir donné asile. Le fait était à la fois vrai et faux : le roi était follement amoureux ; mais Condé, en feignant une jalousie dont il était incapable, exploitait la passion du roi au profit de son ambition, et forçait le roi à sévir contre un rebelle.

Malheureux en famille, en guerre et en politique, M. le Prince se consola de tout par l’amour des richesses, et,

  1. Charlotte de la Trémouille, femme de Henri de Condé, premier du nom, captive pendant huit ans, acquittée, mais non justifiée.