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quantité, disposées comme en amphithéâtre et par étages, qu’un homme qui les avait étudiées et observées depuis longtemps, à peine les pouvait-ils comprendre[1]. »

C’est dans ce labyrinthe de pierre, dans cet arcane significatif, dans ce repaire de grand vassal, que résidait Henri de Bourbon, deuxième du nom, prince de Condé, lequel, après trois ans de captivité pour rébellion à la couronne, venait de se réconcilier avec la cour et de rentrer dans son gouvernement de Berry.

Il joignait à cette charge celles de lieutenant-général, de bailli de la province et de capitaine de la grosse tour de Bourges : c’est-à-dire qu’il avait le pouvoir politique, civil et militaire de tout le centre de la France, puisqu’il jouissait des mêmes droits et charges pour la province de Bourbonnais.

Ajoutez à ce pouvoir une fortune immense, augmentée des sommes que chaque rébellion des Condés coûtait, sous forme d’indemnité, à la couronne, c’est-à-dire à la France ; de l’achat à peu près forcé des terres et châteaux splendides que Sully possédait en Berry, et qu’il fallait céder à M. le Prince à grand’perte, en raison de la dureté des temps et des malheuretez du pays ; de la sécularisation, c’est-à-dire la suppression, au profit du prince, des plus riches abbayes de la province (entre autres celle de Déols) ; des présents imposés par l’usage, la flatterie ou la poltronnerie à la grosse bourgeoisie des villes ; des lourds bassins d’or et d’argent pleins de moutons du Berry en belle monnaie d’or et d’argent ; des carrosses d’azur, sculptés et ornés de satyres d’argent ; traînés de six beaux chevaux harnachés de cuir de Russie rehaussé d’argent ; des impôts, pressurages et vexations

  1. Mémoires de M. Lenet.