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— Va donc en bas, toi ! ma femme t’appelle !

Puis il se présenta résolûment en face de la Proserpine et la regarda avec cette suprême dignité que l’homme de cœur est seul capable d’invoquer contre de lâches adversaires.

Malgré le grotesque accoutrement de son maître, la servante Bellinde ne put se défendre d’un sentiment de respect et de remords. Elle tenait dans ses mains la vie de celui qu’elle voulait humilier et piller, mais non pas faire tourmenter et égorger. Elle hésita encore un instant, et dit :

— Ma foi, maître Pignoux, je vous reconnais à cette heure ! mais par la mordi ! vous êtes bien changé ! Vous avez donc fait une grosse maladie ?

— Oui, madame, répondit Bois-Doré touché de ce bon mouvement : j’ai eu beaucoup de fatigue dans ma maison depuis que j’ai été forcé de me séparer d’une personne qui me servait fort bien.

— Je sais de qui vous parlez, reprit la Bellinde. C’était un trésor que vous avez méconnu et jeté à la porte comme un chien. Oui, oui, je sais comment la chose s’est passée. Tout le tort est de votre côté, et, à présent, vous en êtes aux regrets ! Mais il est trop tard, ma foi ! elle ne vous servira plus !

— Elle fera bien de ne plus servir personne, si elle peut s’en dispenser ; mais je me flatte que, en quelque situation qu’elle soit, elle n’a point oublié ma générosité envers elle. Je la quittai sans reproche et sans lésinerie, elle pourra vous le dire.

— Il suffit ; nous parlerons de ça plus tard. Servez-nous bien, et, pour ce, retournez à votre ouvrage, mon vieux. Allez !