Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/127

Cette page n’a pas encore été corrigée

dédaigneux, en frottant les lourdes semelles de ses grosses bottes crottées, sur les barreaux propres et luisants d’une chaise de noyer. Est-ce là un feu pour des voyageurs de nuit ? Le bois manque-t-il dans cette baraque ?

— Hélas ! monsieur, dit la servante en jetant une brassée de fagot dans la cheminée, déjà bien flambante, nous ne pouvons mieux faire : nous sommes en pays de plaine et le bois est rare.

— Voilà une sotte fille et encore plus laide, s’il est possible, que sa maîtresse ! reprit le gracieux Macabre. Tiens, la belle édentée, voilà comme on se chauffe, quand le bois est cher !

Et il jeta, dans la vaste cheminée, la chaise sur laquelle il venait de décrotter ses pieds.

— Or çà, lieutenant, continua-t-il froidement, en s’adressant à Saccage, vous dites qu’il y a ici un petit loqueteux envoyé par ces…

— Te voilà enfin ! répondit Saccage en levant sa botte pour pousser Mario plus vite vers le respectable capitaine.

Mario esquiva l’outrage en passant lestement sous la botte du reître, et, arrivant près de l’autre butor, il lui dit avec aplomb :

— C’est moi, et voilà mon message ; car j’ai très-bien dit le mot de passe à votre lieutenant. Vous ne pouvez point rester dans cette auberge, parce qu’une grande troupe de gens armés s’y doit rendre cette nuit. Vous ne pouvez point attaquer le château, qui est bien gardé. Il vous faut retourner d’où vous venez, ou la chose tournera mal pour vous ; c’est Sanche qui vous le dit.

— Ton Sanche n’est qu’une vieille bourrique, répondit le capitaine.