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que ça, mes Cupidons ! Allons, milles tonnerres du diable, pointez, pointez ! Faites-moi une fricassée de ces oiseaux de ténèbres !

La petite artillerie du manoir découragea les bandits, qui n’avaient pas de quoi y répondre, et qui, emportant leurs blessés, se décidèrent, en attendant mieux, à aller piller et banqueter dans la ferme abandonnée.

On jeta des veaux et des moutons tout vivants dans la meule embrasée, d’où s’exhala bientôt une âcre odeur de toison brûlée. On repoussait, à coups de fourche, les malheureuses bêtes qui voulaient échapper à ce supplice. Elles furent dévorées, moitié crues, moitié en charbons. Les tonneaux du cellier de la ferme furent défoncés. Tout s’enivra plus ou moins, même les enfants et les blessés. On jeta dans le feu le corps du malheureux fermier, et l’on eût traité de même les deux valets prisonniers, sans l’espoir de leur rançon, et cela, en dépit de Sanche, qui ne voulait faire quartier à personne.

Seul, le vieil Espagnol ne songeait ni à manger ni à boire, ni à voler. C’était contre son gré que la bande de Brilbault avait devancé les auxiliaires plus sérieux qu’il attendait impatiemment pour consommer sa vengeance. Il s’inquiétait, non d’y perdre la vie, il en avait fait d’avance le sacrifice, mais de voir échouer son entreprise par la précipitation et l’avidité des misérables qui s’y étaient associés.

Ne pouvant les retenir jusqu’à l’heure où ses véritables alliés devaient ouvrir la marche et conduire l’expédition, il les avait suivis pour ne laisser à personne le soin de torturer les beaux messieurs de Bois-Doré, s’ils avaient la mauvaise chance de tomber aux mains de ces volereaux.