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était, en vingt endroits, écroulé jusqu’au niveau du sol, et il y avait longtemps que l’on ne faisait plus la dépense d’y placer des portes.

Ces bruits, que les habitants du château et même ceux de la ferme prirent d’abord pour quelque chasse donnée par les villageois à un gros gibier fourvoyé dans leurs enclos, prirent bien vite un caractère plus alarmant.

Chacun s’arma de ce qui lui tomba sous la main, et les batteurs en grange, brandissant leurs fléaux, coururent à la tour de l’huis. Mais ils furent à l’instant repoussés et paralysés par les habitants du bourg, qui, venant de toutes les directions, se trouvaient assemblés aux abords du pont, et, dans leur épouvante, étouffaient et renversaient les gens accourus à leur secours.

La bande des assaillants ne se composait cependant que d’une cinquantaine d’hommes suivis de femmes et d’enfants ; mais on se souvient que le marquis avait mis sur pied et envoyé à l’attaque de Brilbault tous les hommes solides et hardis de son petit fief, si bien que la population surprise par les brigands était en ce moment composée aussi de femmes et d’enfants, de vieillards estropiés ou d’adolescents malingres.

La vue des figures horribles affublées par ces bandits produisit l’effet qu’ils s’en étaient promis. Une panique générale s’empara des paysans, et la peur ne leur donna que la force qu’il fallait précisément pour empêcher les bons serviteurs du château de se porter à la rencontre des ennemis.

Un des morts que Mario trouva sur le chemin était un jeune homme infirme qui tomba et fut écrasé sous les pieds des fuyards ; l’autre, un pauvre bon vieux qui seul essaya de se retourner contre l’ennemi, et fut assommé par Sanche à coups de crosse.