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Tout le monde fit fête au gentil Mario, qui, par son bon naturel, son air affectueux et son beau regard, gagnait spontanément et irrésistiblement tous les cœurs.

— Alors, dit de Beuvre à sa fille en la prenant à part, vous voilà, non plus fiancée à notre vieux voisin, mais à son marmot ; car il me semble que c’est ainsi qu’il lui plaît de tourner la chose à présent.

— Dieu le veuille, mon père ! répondit Lauriane, et, s’il y revient, je vous prie de feindre, comme moi, de souscrire à cet arrangement, que le bonhomme est capable de prendre au sérieux.

— Il le prenait bien au sérieux quand il s’agissait de lui ! reprit de Beuvre. La différence d’âge entre vous et ce petit garçon se compte par années, tandis qu’entre le marquis et vous, elle se peut bien compter par quarts de siècle. N’importe, je vois que le cher homme a perdu la notion du temps pour les autres aussi bien que pour lui-même ; mais le voici qui vient à nous ! je le veux faire enrager un peu !

Bois-Doré, sommé par de Beuvre de s’expliquer, déclara fort gravement qu’il n’avait qu’une parole, et qu’ayant engagé sa liberté et sa foi à Lauriane, il se regardait comme son esclave, à moins qu’elle ne lui rendit sa promesse.

— Je vous la rends, cher Céladon ! s’écria Lauriane.

— Mais son père l’interrompit. Il voulait la taquiner aussi.

— Non pas, non pas, ma fille ; ceci regarde l’honneur de la famille, et votre père ne se laisse point berner ! Je vois bien que votre capricieux et fantasque Céladon s’est pris de tendresse paternelle pour ce beau neveu, et qu’il aime autant désormais se trouver père sans avoir