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PROCOPE LE GRAND.

lui-même, quand l’heure de la guerre civile recommence à sonner. Jusqu’alors les catholiques, fidèles au parti de Sigismond, avaient été considérés par eux comme des ennemis naturels, comme des étrangers. Mais ces Catholiques réconciliés, mais ces Calixtins qui avaient presque toujours marché avec eux contre l’étranger, et qui avaient défendu comme eux la révolution autant que le sol national, ils s’étaient habitués à les regarder, malgré leurs fréquentes ruptures, comme des frères de race et de religion. Au moment de leur livrer un duel à mort, leurs consciences étaient bouleversées ; et, au moindre échec, transportés de rage, ils étaient prêts à accuser leurs chefs. Procope fut soupçonné par eux, comme autrefois Ziska, de céder à des ressentiments personnels. Plusieurs opinions se partageaient les esprits. On disait que lorsque les chefs taborites étaient rassemblés à une même table, ils se jetaient les vases et les gobelets à la tête. Procope éprouva un instant d’insurmontables dégoûts, et quitta l’armée. Les Taborites coururent après lui, et le ramenèrent vaincu par leurs instances et leurs larmes. Les Pragois eux-mêmes, soit qu’ils ne se trouvassent pas prêts à se passer de lui, soit qu’ils voulussent le forcer à séparer sa cause de la leur, l’engagèrent à retourner au camp.

Le siége de Pilsen fut donc repris avec ardeur ; mais le concile fit passer de l’argent aux habitants, et les Calixtins (honteuse trahison) réussirent à y introduire des vivres. Dans une sortie, les assiégés prirent sur les Orphelins un chameau qu’ils avaient pris en Presse sur les Chevaliers Teutoniques, et qu’ils promenaient avec amour-propre à travers la Bohême. Cette perte les affligea puérilement, et ils jurèrent de périr devant la ville, plutôt que de ne pas reconquérir leur étrange trophée. Cepen-