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PROCOPE LE GRAND.

écrasés par leur faute au siége de Kolin, leur demandent s’ils ont eu une bonne Saint-Martin. Mais, en toute rencontre, ces mêmes Taborites volent à leur secours, et achèvent glorieusement ce qu’ils ont audacieusement commencé. Les Orphelins jouent là le rôle que les troupes régulières de Marie-Thérèse laissaient aux Pandoures de la Croatie, dans les guerres contre Frédéric le Grand. Ce sont eux qui tentent les coups les plus insensés, qui se jettent dans l’eau, dans le feu, dans la glace, et qui, par leur fanatique mépris de la vie, rendent possible ce que la raison eût repoussé. Il est vrai que, sans Procope et sa cohorte invincible, à la fois prudente et acharnée, ces enthousiastes eussent été martyrs plus souvent que vainqueurs. Expliquera-t-on leurs querelles en temps de paix par la différence de leurs tempéraments et de leur conduite en temps de guerre ? Ce serait expliquer le fait par le fait, et il est évident pour nous que cette fureur aveugle qui les poussait à sacrifier leurs vies, sans égard pour les dangers formidables qu’ils attiraient sur le reste de l’armée, était le résultat de quelque croyance particulière, peut-être celle de la résurrection immédiate dans de nouveaux corps, qui avait été prêchée à couvert durant les dernières années de Ziska.

Quoi qu’il en soit, la conférence de Béraune[1] remua chaudement la question du dogme de la transsubstantiation, et celle du libre arbitre, de la justification et de la prédestination. On ne nous dit pas quelle part y eurent les uns ou les autres. On nous montre Procope soutenant, sans défaillance et sans variation, la croyance des Picards Taborites, qu’on pourrait appeler aussi croyances Bérengariennes. Comme, depuis le commencement de la

  1. Ville royale de Bohême sur la Mise, dans le district de Podwester.