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PROCOPE LE GRAND.

Le lendemain, tandis qu’on procédait à l’exécution des citoyens soupçonnés d’avoir pris part à la conspiration, on força Koribut à signer son abdication, et on le renvoya secrètement nous bonne escorte jusqu’aux frontières de la Pologne.

Cependant la conduite ultérieure de ce prince nous démontre la sincérité de ses intentions. Il appela auprès de lui les principaux d’entre les Orphelins et les Taborites, et alla trouver le roi de Pologne, non pour rentrer en grâce avec lui et le saint-siège, mais pour lui demander hardiment secours et protection pour les libertés de la Bohême. Wladislas, qui ne se souciait plus de s’attaquer à l’Empereur et au pape, affecta un grand zèle pour la religion, et traita Koribut et ses adhérents comme des impies et des insensés. Tout ce qu’ils obtinrent de lui, ce fut de nouvelles promesses de les recommander à la miséricorde de Dieu et du saint-siège, s’ils voulaient se convertir. Koribut ne fléchit point, et s’emporta même jusqu’à menacer en termes peu diplomatiques le roi, les évêques, les églises de Pologne et jusqu’à saint Stanislas, patron du royaume, de la fureur des Taborites. Après cette sortie non équivoque, il fut forcé de quitter la Pologne, où l’interdit et les menaces le poursuivaient de ville en ville, et il rentra en Bohême avec ses jacobins pour se joindre à l’armée taborite. Étrange destinée d’un prince qui était venu chercher le pouvoir au milieu de cette révolution, qui avait combattu le peuple pour s’emparer de la couronne, et qui maintenant se jetait dans les bras de ce même peuple, calomnié et persécuté par ses premiers partisans, pour avoir passé à la république.

La guerre civile recommença donc avec fureur entre les modérés et les enthousiastes. Taborites, Orébites et Orphelins reprirent plusieurs villes sur le juste-milieu,