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d’art. Il disait ce que je pense aussi de cette manière de traduire le mouvement de la vie ; c’est la recherche d’une convention très bien réglée qu’on ne voit pas. L’operante dans son étroit castello, invisible, ignoré, supprimé pour ainsi dire, a toute sa pensée parfaitement libre de préoccupation extérieure. Au bout de ses mains élevées au-dessus de sa tête, il fait mouvoir un monde qui réalise et personnifie les émotions qui lui viennent. Il voit ces personnages qui lui parlent de près, et qui, de sa main droite, demandent impérieusement une réponse à sa main gauche. Il faut qu’il reste court ou qu’il s’enfièvre, et, une fois enfiévré, il se sent lucide, parce que ses fictions ont pris corps et parlent pour ainsi dire d’elles-mêmes. Ce sont des êtres qui vivent de sa vie et qui lui en demandent une dépense complète sous peine de s’éteindre et de se pétrifier au bout de ses doigts. Il faut qu’elles disent et fassent ce qui est dans leur nature. Ce ne sont pas des rôles bien écrits qu’elles exigent, ce ne sont pas des fioritures littéraires, ni des expressions triées sur le volet : ce sont des raisons qui portent, c’est le parce que de toutes leurs actions et le pourquoi de leur situation. Les paroles les plus ingénieuses ne masqueraient pas les invraisemblances du caractère