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pièce, décorée par les hôtes du titre de salon. Le carreau de briques rougeâtres bien lavées, les boiseries brunes soigneusement dégagées de poussière, la glace dont le cadre avait été doré jadis, les meubles massifs brodés au petit point par quelque aïeule de la famille, et deux ou trois tableaux de dévotion légués par l’oncle, curé de la ville, tout était précisément resté à la même place et dans le même état de vétusté robuste depuis dix ans, dix ans pendant lesquels l’étrangère avait vécu des siècles ! Aussi tout ce qu’elle voyait la frappait comme un rêve.

La salle, vaste et basse, offrait à l’œil une profondeur terne qui n’était pourtant pas sans charme. Il y avait, dans le vague de la perspective, de l’austérité et de la méditation, comme dans ces tableaux de Rembrandt où l’on ne distingue, sur le clair-obscur, qu’une vieille figure de philosophe ou d’alchimiste brune et terreuse comme les murs, terne et maladive comme le rayon habilement ménagé où elle nage. Une fenêtre à carreaux étroits et montés en plomb, ornée de pots de basilic et de géranium, éclairait seule cette vaste pièce ; mais une suave figure se dessinait dans la lumière de l’embrasure, et semblait placée là, comme à dessein, pour ressortir seule et par sa propre beauté dans le tableau : c’était Pauline.

Elle était bien changée, et, comme la voyageuse ne pouvait voir son visage, elle douta longtemps que ce fût elle. Elle avait laissé Pauline plus petite de toute la tête, et maintenant Pauline était grande et d’une ténuité si excessive qu’on eût dit qu’elle allait se briser en changeant d’attitude ; elle était vêtue de brun, avec une petite collerette d’un blanc scrupuleux et d’une égalité de plis vraiment monastique. Ses beaux cheveux châtains étaient lissés sur ses tempes avec un soin affecté ; elle se livrait à un ouvrage classique, ennuyeux, odieux à toute organisation pensante : elle faisait de très-petits points régu-