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du bon Dieu ; bonjour, mon brave Émile, bonjour, Antoine, mon maître !… bonjour, toi, dit-il à Galuchet ; je ne te connais pas, mais c’est égal. Ah ! c’est l’homme d’affaires au père Cardonnet ! Eh ! bonjour, vous, mon pauvre monsieur Sacripant ; je ne faisais pas attention à vos honnêtetés.

— Eh ! vive Dieu ! s’écria Antoine, vaut mieux tard que jamais ; mais sais-tu, Jean, que tu te déranges ? Comment, quand on n’a plus qu’un jour par semaine pour te voir, et Dieu sait que la semaine est longue sans toi ! tu arrives le dimanche à midi ?

— Écoutez, mon maître…

— Je ne veux pas que tu m’appelles ton maître.

— Et si je veux t’appeler comme ça, moi ! J’ai été bien assez longtemps le tien, et ça m’ennuierait de commander toujours. À présent, je veux être ton apprenti pour changer un peu. Allons, à boire, Janille, du frais tout de suite. J’ai chaud ! Ce n’est pas que je sois à jeun ; ils n’ont pas voulu me laisser partir après la messe, ces bons amis de Gargilesse ! Il a fallu aller babiller un peu chez la mère Laroze, et on ne peut pas se dessécher le gosier à causer sans boire. Mais je suis venu vite, parce que je savais bien qu’on pensait à moi, ici. Tenez, voyez-vous, ma Gilberte, depuis que je suis rentré dans l’endroit, il faudrait que le dimanche durât quarante-huit heures pour que je pusse contenter tous les amis qui me font fête !

— Eh bien, mon bon Jean, si vous êtes heureux, cela nous console un peu de vous voir moins souvent, dit Gilberte.

— Heureux, moi ? reprit le charpentier : il n’y a personne de plus heureux que moi sur la terre !

— On le voit bien, dit Janille. Voyez comme il a repris bonne mine depuis qu’il n’est plus dépisté tous les matins comme un vieux lièvre ! Et puis il se fait la barbe tous les