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était prévenue par la lettre de son fils. Elle couvrit l’enfant de caresses, et, le remettant dans les bras de Caroline : — Ma fille, lui dit-elle, vous acceptez donc le soin de nous rendre tous heureux ? Soyez mille fois bénie, et si vous voulez me conserver longtemps, ne me quittez plus. Je vous ai fait bien du mal, mon pauvre bon ange ; mais Dieu n’a pas permis que ce fût long, car j’en serais morte avant vous !

Le marquis et sa femme passèrent le reste de la belle saison à Mauveroche et quelques jours d’automne à Séval. Ce lieu leur était cher, et malgré la joie de retrouver leur famille à Paris, ce ne fut pas sans effort qu’ils s’arrachèrent d’une retraite consacrée par leurs souvenirs.

Le mariage du marquis n’étonna personne ; les uns l’approuvèrent, les autres prédirent avec dédain qu’il se repentirait de cette excentricité, qu’il serait délaissé de tous les gens raisonnables, que c’était une existence effacée, manquée. La marquise faillit souffrir un peu de ces propos. Madame d’Arglade poursuivait Diane, Caroline et leurs époux de sa haine ; mais tout tomba à la révolution de février, et on pensa à bien autre chose ! La marquise eut grand’peur et crut devoir se réfugier à Séval, où elle trouva le bonheur quand même. Le marquis, au moment de faire paraître son livre anonyme, remit la publication à des temps plus calmes. Il ne voulut pas frapper sur les vaincus du jour. Heureux par l’amour et la famille, il est peu pressé de connaître la gloire.