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Caroline ne comprenait pas et ne pouvait pas comprendre qu’il y eût dans tout ceci une allusion au mariage de Gaëtan. Elle crut qu’il ne s’agissait que de son frère, et comme elle n’avait jamais faibli un instant vis-à-vis d’elle-même, elle trouva que la marquise n’avait pas le droit de fouiller dans les douloureux secrets de son âme. — Je n’ai jamais rien eu à sacrifier, répondit-elle avec fierté. Si vous avez quelque chose à m’ordonner, dites-le, madame, et ne pensez pas qu’il y ait aucun mérite de ma part à vous obéir.

— Vous voulez dire… et vous dites, ma chère, que vous n’avez jamais partagé les sentiments du marquis pour vous ?

— Je ne les ai jamais connus.

— Vous ne les aviez pas devinés ?

— Non, madame, et je n’y crois pas. Qui a pu vous faire penser le contraire ? Ce n’est pas lui assurément !

— Eh bien ! pardonnez-moi, c’est lui. Vous voyez quelle confiance j’ai en vous ! Je vous dis la vérité, je me livre sans réserve à votre grandeur d’âme. Mon fils vous aime et croit pouvoir être aimé de vous !

— M. le marquis s’est étrangement trompé, répondit Caroline, blessée d’un aveu qui, présenté ainsi, était presque une offense.

— Ah ! vous dites la vérité, je le vois, s’écria la marquise, abusée par la fierté de mademoiselle de Saint-Geneix, et, voulant s’emparer d’elle par l’amour-propre, elle la baisa au front. Merci, ma chère enfant, lui dit-elle vous me rendez ta vie ! Vous êtes franche,