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demoiselle de Saint-Geneix par des obstacles que tu ne croyais peut-être pas vaincre si aisément, qui donnaient peut-être une énergie factice à ton désir. Ne secoue pas la tête. Qu’en sais-tu toi-même ? D’ailleurs, ce que je te demande, c’est bien peu de chose. Vingt-quatre heures sans lui parler de rien, voilà tout. Moi-même j’ai besoin d’accepter complétement devant Dieu le parti que je viens de prendre, afin que ma figure, mon trouble, mes larmes ne laissent pas deviner à Caroline que cela m’a un peu coûté…

— Oh ! oui, vous avez raison, s’écria le marquis. Si elle le devinait, elle ne me laisserait pas lui parler. À demain donc, ma bonne mère ! Vingt-quatre heures, dites-vous ? C’est bien long ! … Et puis… il est une heure du matin. Vous veillerez donc encore la nuit prochaine ?

— Mais oui, puisque nous avons concert demain dans les appartements de la jeune duchesse. C’est pour cela qu’il faut que nous dormions cette nuit. Est-ce que tu vas retourner au bal ?

— Ah ! permettez-le-moi ; elle est encore là ! … et elle est si belle avec sa robe blanche et ses perles ! Je ne l’ai vraiment pas assez regardée. Je n’osais pas… C’est à présent seulement que je vais la voir !

— Eh bien ! fais-moi ce sacrifice à ton tour, de ne pas la revoir, de ne pas lui parler avant demain soir. Jure-moi, puisque tu ne songes guère à dormir, de penser à elle, à moi et à toi-même, tout seul, pendant quelques heures, et encore demain matin. Tu ne