Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/19

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tranquillité d’esprit et à une singulière absence de préoccupations personnelles. Ce caractère assez exceptionnel se développera et s’expliquera par la suite de notre récit, autant qu’il nous sera possible ; mais il est nécessaire que le lecteur veuille bien se rappeler ceci, qui est connu de tout le monde, à savoir que personne ne peut expliquer complétement et mettre dans un jour absolu le caractère d’une autre personne. Tout individu a au fond de son être un mystère de puissance ou d’impuissance qu’il peut d’autant moins révéler qu’il ne le comprend pas lui-même. L’analyse doit paraître satisfaisante quand elle approche de la vérité, mais elle ne saurait la saisir sur le fait sans laisser incomplète ou obscure quelque face de l’éternel problème des choses de l’âme.


II


Caroline était donc à la fois triste et gaie en parcourant toute seule, tantôt à pied, tantôt en omnibus, ce grand Paris où elle avait été élevée dans l’aisance, et qu’elle avait quitté ruinée et brisée dans son avenir, au moment de la plus belle floraison de la vie. Disons en peu de mots, et pour n’y pas revenir, les événements graves, mais peu compliqués, qu’elle avait esquissés devant la marquise de Villemer.