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si je peux guérir, je guérirai, et que je ferai pour cela tout ce que doit faire un homme qui connaît l’étendue de ses devoirs. Calme-toi. J’ai dû te dire ce dont je suis menacé pour que tu me pardonnes bien dans ton cœur une fureur toute fébrile. Garde-moi le secret ; il ne faut pas alarmer inutilement notre pauvre mère. Si le moment de la préparer arrive… je le sentirai, et je t’avertirai. Jusque-là, du calme, je t’en supplie !

— Du calme ! c’est à toi qu’il en faut, reprit le duc, et te voilà justement aux prises avec la passion ! C’est la passion qui a réveillé ce pauvre cœur au physique en même temps qu’au moral. C’est de l’amour, c’est du bonheur, de l’ivresse ou du sentiment qu’il te faut ! Eh bien ! rien n’est perdu alors… Dis, tu veux qu’elle t’aime, cette fille ? Elle t’aimera. Qu’est-ce que je te dis ? Elle t’aime, elle t’a toujours aimé… dès le premier jour. À présent je me rappelle tout. Je vois clair. C’est toi…

— Laisse, laisse ! dit le marquis en retombant sur son fauteuil ; je ne peux pas t’entendre… ; cela m’étouffe.

Mais après un instant de silence, durant lequel le duc l’observait avec inquiétude, il parut mieux et dit avec un sourire où sa figure mobile retrouva tout le charme de la jeunesse :

— C’est pourtant vrai ce que tu disais là ! C’est peut-être l’amour ! ce n’est peut-être pas autre chose ! Tu m’as bercé d’une illusion, et je m’y suis laissé aller