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point l’offenser… Et, las de feindre, il ajouta : Je voulais lui parler seulement !

— De qui ? de moi ?

— Oui, peut-être. J’aurais voulu savoir si elle t’aimait.

— Et pourquoi ne lui as-tu point parlé ?

— Je ne sais pas ; je n’ai pu lui dire un mot.

— Souffres-tu ?

— Oui, je suis malade, très-malade aujourd’hui.

— Rentrons, frère, dit le duc. Je sens que tu as la fièvre, et la rosée tombe.

— N’importe, dit le marquis en s’asseyant sur une souche au bord de l’allée. Je voudrais être mort !

— Urbain ! s’écria le duc, frappé enfin d’une vive lumière, c’est toi qui aimes mademoiselle de Saint-Geneix…

— Moi l’aimer ? N’est-elle pas… ne doit-elle pas être ta maîtresse ?

— Jamais, puisque tu l’aimes ! Pour moi, ce n’était qu’un caprice : le désœuvrement, l’amour-propre ; mais, aussi vrai que je suis le fils de mon père, elle n’a pas pour moi le moindre penchant, elle n’a pas seulement compris mes finesses ; elle est aussi pure, aussi libre, aussi fière que le jour où elle est entrée chez nous.

— Pourquoi la laissais-tu seule dans ce bois après l’y avoir entraînée ?

— Ah ! tu me soupçonnes après le serment que je viens de te faire ! Est-ce que l’amour te rend fou, dis ?