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vague, mais réelle, n’osa se retourner, poussa Jacquet en avant, et rentra au galop sans voir personne.

Le duc était à dix pas de là quand eut lieu cette rencontre singulière. Il ne vit rien, mais il entendit la voix effrayée de mademoiselle de Saint-Geneix au moment où le cheval s’arrêtait tout d’un coup. Il se hâta, et, se trouvant face à face avec l’inconnu, il le saisit au collet en lui disant : — Qui êtes-vous ?

L’inconnu se débattit vigoureusement pour se soustraire à l’examen ; mais le duc était d’une force herculéenne, et il amena bon gré, mal gré, son adversaire hors du couvert, au milieu de l’allée. Là, sa surprise fut inexprimable lorsqu’il reconnut son frère.

— Mon Dieu ! Urbain, s’écria-t-il, ne t’ai-je pas frappé ? Il me semble que non… Mais pourquoi donc ne me répondais-tu pas ?

— Je ne sais pas, répondit M. de Villemer fort ému. Je ne reconnaissais pas ta voix !… M’as-tu parlé ? Pour qui me prenais-tu donc ?

— Eh ! ma foi, pour un voleur, tout bonnement ! N’as-tu pas effrayé mademoiselle de Saint-Geneix tout à l’heure ?

— J’ai peut-être effrayé son cheval sans le vouloir. Où est-elle ?

— Parbleu, elle se sauve, elle a peur ; ne l’entends-tu pas galoper vers la maison ?

— Pourquoi donc avoir peur de moi ? reprit le marquis avec une singulière amertume ; je ne voulais