mandé d’avoir une fortune au niveau de leur élévation naturelle. Je souffre amèrement, je vous le déclare, quand je vois le marquis compter avec ses fermiers lui-même, se préoccuper de certains gaspillages inévitables, descendre même au besoin aux détails de ma cuisine. Pour qui connaît notre détresse, c’est admirable à lui de se tourmenter ainsi pour que je ne manque de rien ; mais pour ceux qui ne s’en font point une idée juste, nous passons certainement pour des avares, et nous tombons au niveau de la petite bourgeoisie !
— Puisque vous souffrez tant, dit Caroline, de ce que je regardais comme une vie aisée, très-honorable, très-glorieuse même, Dieu veuille que ce mariage réussisse, car il vous faudrait refaire provision de courage en cas d’obstacle. Cependant s’il m’était permis d’avoir une opinion…
— Il faut toujours avoir des opinions. Parlez, ma chère enfant.
— Eh bien ! je dirai que le plus sage et le plus sûr serait d’accepter le présent comme très-supportable sans pour cela renoncer au mariage en question.
— Et qu’importent les déceptions, ma pauvre petite ? Vous les craignez pour moi ? Elles ne tuent pas, et les espérances font vivre. Mais pourquoi doutez-vous du succès des miennes ?
— Oh ! je ne doute pas, répondit Caroline ; pourquoi douterais-je, si mademoiselle de Xaintrailles est aussi parfaite qu’on le dit ?