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après une nouvelle tentative de ma part, elle m’a dit, pas plus tard que ce matin : « Vous avez raison, chère marraine, j’ai le droit et le pouvoir d’enrichir un homme de vrai mérite. Tout ce que vous me dites du fils de votre amie me donne une grande idée de lui. Laissez-moi achever mon deuil au couvent, et je consens à le voir chez vous l’automne prochain. »

« Il est bien entendu que, dans tout cela, je n’ai nommé personne ; mais l’histoire de vos deux fils et la vôtre sont assez connues pour que ma chère Diane ait deviné. Je n’ai pas cru devoir m’abstenir de faire valoir à l’occasion la belle conduite du marquis. Le duc son frère l’a proclamée lui-même en tous lieux avec une sensibilité qui lui fait honneur. Ne prolongez donc pas trop avant dans la mauvaise saison votre retraite à Séval. Il ne faut pas que Diane voie trop de monde avant l’entrevue. Le monde ôte toujours, même aux âmes les plus candides, cette première fraîcheur de croyance et de générosité que j’admire et que j’entretiens de mon mieux chez ma noble filleule. Vous continuerez mon ouvrage quand elle sera votre fille, ma digne amie ! C’est le plus ardent de mes vœux de voir votre cher fils recouvrer la place qui lui est due dans le monde. Il est beau à lui de l’avoir perdue sans sourciller, et ce qu’une personne de race peut faire de plus beau, c’est de la lui rendre. C’est un devoir pour les filles des preux de donner ces grands exemples de fierté d’âme à messieurs les parvenus du jour, et comme je suis une de ces filles-là, je tiens à réussir,