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de beauté que de charme. Leurs têtes, coiffées d’un petit chapeau de feutre noir orné de jais et de plumes, ont, dans la jeunesse, un certain éclat, et dans la vieillesse une austérité assez digne ; mais tout cela est trop mâle, les épaules larges et carrées sont en désaccord avec le corps grêle, et le manque absolu de propreté rend leur toilette désagréable à regarder. Dans la montagne, c’est une exhibition de guenilles incolores sur de longues jambes nues et fangeuses, sans préjudice des bijoux d’or, et même de diamants au cou et aux oreilles, contraste de luxe et de misère qui m’a rappelé les mendiantes de Tivoli.

Pourtant les femmes d’ici sont laborieuses. L’art de la dentelle est enseigné par la mère à sa fille. Aussitôt que l’enfant commence à babiller, on lui met une grosse pelote de corne sur les genoux et des paquets de bobines entre les doigts. À l’âge de quinze ou seize ans, elle sait faire les plus merveilleux ouvrages, ou elle est réputée idiote et indigne du pain qu’elle mange ; mais dans l’exercice de cet art délicat et charmant, si bien approprié à l’adresse patiente de la femme, une autre tyrannie que celle du clergé pèse sur la Velaisienne : c’est celle du commerçant qui l’exploite. Comme toutes les paysannes du Velay et d’une grande partie de l’Auvergne savent faire ces ouvrages, elles subissent toutes également la loi du bon marché, et on est effrayé de l’exiguïté sordide du salaire. Là, le commerçant ne gagne pas sur le producteur cent pour cent, ce qui est, selon le premier,