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n’empêchait pas de respecter ou de craindre l’idée cachée sous le symbole.

EUGÈNE. — Tu es fort, toi ! Comme tu retiens ça !

MAURICE. — Mais voyons, sans rire, est-ce vrai que nous sommes portés au mal, et qu’il y a dans nous, ou autour de nous, une attraction mystérieuse pour ce qui nuit aux autres et à nous-mêmes !

ÉMILE. — Je le nie !

DAMIEN. — On ne vous parle pas. Écrivez donc !

MAURICE, regardant le dessin d’Eugène. — Que diable fais-tu là ? Est-ce un chien ou une casquette ?

EUGÈNE. — Tu vois bien que c’est une casquette, puisque ça n’a pas de pattes !

MAURICE. — Enfin, je vous le demande ? sommes-nous méchants par nature, ou bien y a-t-il un principe de méchanceté répandu dans notre atmosphère, qui nous bouscule l’entendement ?

EUGÈNE. — Grave question, messeigneurs ! Moi, je crois au diable sous une figure palpable : une bouteille de Champagne ou la belle Myrto. Voilà les principes sataniques qui flottent dans nos atmosphères !

DAMIEN. — Ce grand esprit vient d’éclairer la question ! Le diable est dans les êtres qui nous entourent, donc il est en nous aussi, à moins que nous soyons des anges. (À Émile.) Qu’en pensez-vous, hein, swédenborgiste ?

ÉMILE. — Moi ? pas du tout !

DAMIEN. — Écrivez donc ! on ne vous dit rien.

MAURICE. — Bah ! nous ne sommes ni anges, ni diables.

EUGÈNE. — Nous sommes donc des bêtes ?

ÉMILE. — C’est mon avis pour le moment.

DAMIEN. — Ah çà ! vous tairez-vous, bavard insupportable On ne peut pas se livrer tranquillement aux douceurs de la métaphysique sans que monsieur s’en mêle ?

MAURICE. — Oui, nous sommes de rudes métaphysiciens ! Nous ne pouvons pas seulement nous expliquer ce que c’est que le diable.

EUGÈNE. — Sais-tu pourquoi ?