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FLORENCE. — Jenny ! Céline vous a parlé de moi hier soir ; que vous a-t-elle dit ?

JENNY. — Je ne m’en souviens pas, monsieur.

FLORENCE. — C’est-à-dire que vous ne voulez pas vous en souvenir : pourquoi ?

JENNY. — Mon Dieu, monsieur Florence, je m’étonne de vos questions, ce matin. Je ne vous aurais pas jugé capable de m’en faire jamais auxquelles je ne pusse pas répondre.

FLORENCE. — Si je comprends votre réserve, Jenny, et si j’insiste cependant, que penserez-vous de moi ?

JENNY. — Je penserai qu’il y a des choses que les hommes ne comprennent pas, et je serai forcée de vous dire que ce n’est pas à moi d’être votre confidente.

FLORENCE. — Non, Jenny, je ne vous demande pas cela. Je vous demande si vous pensez qu’une pécheresse repentante puisse être jamais comparée à la vertu sans tache ?

JENNY. — Je sais que l’Évangile dit : « Que celui d’entre nous qui est sans péché lui jette la première pierre. »

FLORENCE. — Ah ! Jenny, vous dites comme Jacques. Vous êtes grande et bonne comme lui !

JENNY. — Monsieur Jacques vous a dit comme cela ! Eh bien, suivez les avis de monsieur Jacques, ils doivent être bons.

FLORENCE. — Ainsi, vous m’approuverez, vous ne m’ôterez pas votre estime si je retourne auprès de Céline ?

JENNY. — Mais… certainement non, monsieur Florence ! De quel droit vous blâmerais-je ? Adieu, je vais faire le chocolat de ma maîtresse. Faut-il, si elle m’interroge, que je lui dise que vous nous quittez ?

FLORENCE. — Non, pas encore, Jenny. Je veux passer la soirée avec les nouveaux amis que j’ai dans le pays, avec vous, avec Jacques, Eugène et les autres. Nous allons à la comédie, vous savez ?

JENNY, riant. — Oui, ce sera très-joli, très-gai, j’en suis sûre !

(Elle étouffe un cri et tombe évanouie.)