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votre souvenir comme celui d’une sœur que la mort m’aurait enlevée ; si vous le voulez, je me réjouirai dans ce souvenir comme dans la pensée d’une sœur vivante, ressuscitée, et dont je puis encore être fier.

MYRTO. — Du respect ? du respect à moi ? Le respect d’un homme de bien pour la pauvre Myrto… pour la pauvre Céline ? Car vous m’avez appelée ainsi, et je ne veux plus porter d’autre nom que celui qui me rappelle le temps de mon innocence et l’heure de votre pardon ! Ah ! oui, je le sens, le respect vaut quelquefois mieux que l’amour, et vous me proposeriez maintenant d’échanger ce que je vous demandais contre ce que vous m’offrez, que je ne le voudrais plus ! Et vous, monsieur Jacques, vous aussi, avec vos cheveux blancs et votre paroles sévère, vous auriez du respect pour moi, si je rentrais dans le chemin du devoir ?

JACQUES. — Oui, ma fille, car vous auriez droit à celui de toutes les âmes équitables. Vous en mériteriez peut-être plus que certaines femmes sans reproche, parce qu’il vous aurait été plus difficile de rentrer dans le bon chemin. Souvenez-vous qu’il y aura plus de joie dans le ciel pour la conversion d’un pécheur que pour la persévérance de cent justes.

MYRTO. — Ah ! ce n’est pas ce que disent les hommes du monde ? Ils nous disent, au contraire, que l’on ne remonte pas la pente de l’honneur, et que la souillure du vice est ineffaçable.

JACQUES. — Ils mentent !

MYRTO. — Eh bien, qu’ils mentent ? que m’importe ? N’y eût-il que vous deux pour me faire aimer la vérité, cela me suffirait. Vous verrez, vous verrez, Marigny ! Je vais vous quitter dans quelques heures, et je ne vous demande pas de me revoir avant que j’aie pu vous dire que j’ai droit à votre estime ; mais dans un an, peut-être, j’aurai déjà réparé bien des fautes, et si je vous demande alors de venir vous en convaincre, me le refuserez-vous ?

FLORENCE. — Non certes ; je vous promets d’aller vous