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imprécations dans mes rêves, j’aurais monté à la prairie de la Quille et j’aurais cherché dans le glacier voisin la mort ignorée que me souhaitait mon rival, et qu’eût acceptée ma femme.

Mais j’étais devenu un homme. La lâcheté ou plutôt l’inutilité du suicide m’était apparue, en même temps que la notion du devoir s’était agrandie et formulée. Je sortis vainqueur de la tentation qui me guettait dans le trouble du sommeil. Éveillé et lucide, je ne m’y arrêtai même pas un instant.

Un autre personnage de l’auteur de Jacques eût pu venir, plus tard ou plus tôt, m’influencer quelque peu. Valvèdre ne recommence pas Jacques. L’infidélité de sa femme rend la vie à son cœur. Il couve et garde un autre amour. La question du divorce est soulevée. Les personnages appartiennent à cette législation et peuvent en profiter. L’époux trahi ne croit pas devoir rompre des liens qui établissent sa protection sur sa femme. Il l’assiste à sa dernière heure, il ne se remarie que quand il peut donner une autre mère à ses enfants.

L’adultère, cette fois, a puni et tué l’épouse. L’époux a triomphé de la colère et de la douleur.

Ma situation n’était point la même, tant s’en faut. Tant qu’elle avait réussi à me tromper, ma femme ne m’avait pas rendu malheureux, et aucune autre ne devait plus me présenter l’idéal d’une meilleure existence. À quoi pouvais-je désormais me rattacher dans la vie qu’on venait de briser ? À rien autre chose que