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de ce tourment que votre apparente sincérité a fait naître.

— Je n’ai pas menti, reprit-elle, je ne mens jamais ; mais quelquefois l’imagination m’emporte, et, sans bien m’en rendre compte, j’exagère. Cela a dû m’arriver quand je me suis plainte à vous des idées de Tonino. Et puis je suis une nature inquiète, vous le savez bien. J’ai pu, j’ai dû me tromper. Peut-être que l’enfant n’a jamais eu les sentiments que je supposais. Le fait est qu’il n’y paraît plus aujourd’hui, et qu’il est très-froid pour moi. N’y songez donc plus ; moi, j’avais oublié tout cela ; ne pouvez-vous l’oublier aussi ? Et faut-il que, pour quelques paroles imprudentes, vous soyez à chaque instant sur le point de me retirer votre confiance ?

— Non, certes, répondis-je, il n’en sera pas ainsi. Je veux oublier ; je veux accepter vos nouvelles explications, et je veux d’autant plus me préoccuper de l’éducation de votre enfant.

— Eh bien, parlez-lui, répondit Félicie tranquillisée. Le voilà pour vous écouter et vous répondre ; je vous laisse ensemble.

Et elle sortit comme Tonino entrait dans la salle, à ma grande surprise. Il vint à moi d’un air triste mais sincère, et m’embrassa avec effusion.

— Vous paraissez étonné de me voir, dit-il ; ne saviez-vous pas que j’étais ici avant le jour ?

— Votre cousine ne me l’avait pas dit.

— Oh ! ma cousine est bien singulière avec moi à