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n’est pas jeune non plus ! C’est le sort de notre village, on dirait, d’avoir sous les yeux vieille maison et vieilles gens.

— Bah ! la jeunesse ne manque pas encore dans le château, dit madame Volabù ; M. le nouveau marquis n’a-t-il pas cinq enfants, dont le plus âgé ne l’est guère plus que monsieur ? En parlant ainsi, madame Volabù me désignait à son mari, dont les yeux s’arrondirent tout à coup, en même temps que sa bouche s’allongeait en une moue assez risible.

— Oh ! s’écria-t-il, M. de Balma a des garçons à présent ! Quand je suis parti, il n’avait qu’une fille, et il n’y a qu’un mois de cela.

— C’est qu’il ne nous disait pas tout apparemment, dit à son tour la vieille madame Peirecote. Depuis un mois, il lui est arrivé une famille nombreuse, deux autres filles et deux garçons, tous beaux comme des amours ; mais qu’est-ce que ça vous fait, Volabù ?

— Ça ne me fait rien, la mère ; mais c’est égal, notre vieux marquis est diablement sournois, car je lui ai entendu dire à M. le curé qu’il n’avait qu’une fille, celle qui est arrivée avec lui le lendemain de la mort du dernier marquis.

— Eh bien, reprit la vieille, c’est qu’il n’y a que celle-là de légitime peut-être, et que les quatre autres enfants sont des bâtards. Ça ne prouve pas un mauvais homme d’avoir recueilli tout ça le jour où il s’est vu riche et seigneur. Sans doute il veut les établir pour effacer devant Dieu tous ses vieux péchés.

— Après ça, ils ne sont peut-être pas à lui, tous ces enfants ? observa madame Volabù.

— Il les appelle tous mes enfants, répondit la mère Peirecote, et ils l’appellent tous mon papa. Quand à savoir au juste ce qui en est, ce n’est pas facile. C’est