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Cette bravoure me transporta. Je tombai aux pieds de Stella, et je les baisai avec enthousiasme.— C’est la première fois, lui dis-je, que je me mets aux genoux d’une femme, et c’est aussi la première fois que j’aime. Je croyais pourtant aimer Cécilia, il y a une heure, je vous dois cette confession ; mais ce que je cherche dans la femme, c’est le cœur, et j’ai vu que le sien ne m’appartenait pas. Le vôtre se donne à moi avec une vaillance qui me pénètre et me terrasse. Je ne vous connais pas plus que vous ne me connaissez, et voilà que je crois en vous comme vous croyez en moi. L’amour, c’est la foi ; la foi rend téméraire, et rien ne lui résiste. Nous nous aimons, Stella, et nous n’avons pas besoin d’autre preuve que de nous l’être dit. Voulez-vous être ma femme ?

— Oui, répondit-elle, car moi, je ne puis aimer qu’une fois, je vous l’ai dit.

— Sois donc ma femme, m’écriai-je en l’embrassant avec transport. Veux-tu que je te demande à ton frère tout de suite ?

— Non, dit-elle en pressant mon front de ses lèvres avec une suavité vraiment sainte. Mon frère aime Cécilia, et il faut qu’il devienne digne d’elle. Tel qu’il est aujourd’hui, il ne l’aime pas encore assez pour la mériter. Laisse lui croire encore que tu prétends être son rival. Sa passion a besoin d’une lutte pour se manifester à lui-même. Cécilia l’aime depuis longtemps. Elle ne me l’a pas dit, mais je le sais bien. C’est à elle que tu dois me demander d’abord, car c’est elle que je regarde comme ma mère.

— J’y vais tout de suite, répondis-je.

— Et pourquoi tout de suite ? Est-ce que tu crains de te repentir si tu prends le temps de la réflexion ?