Page:Sand - Le Beau Laurence.djvu/94

Cette page n’a pas encore été corrigée

vous débite mon maître. C’est un homme terrible à la bataille, je ne dis pas non, mais pas plus que les autres, allez ! Ils sont comme ça une cinquantaine de princes qui s’entendent bien pour flanquer des tripotées aux chiens de Turcs, mais qui voudraient tous commander en premier. Mon maître n’y arrivera pas, il est trop Français ; sa mère n’était pas plus noble que moi, et son père ne descendait pas tout droit des fameux Klémenti de l’ancien temps. On ne voit pas de bon œil les genres européens que se donne monsieur, et ces gardes du corps que vous voyez là, plantés comme des chandelles, sans entendre un mot de ce que nous disons, nous méprisent ; ils voudraient me tordre le cou parce que je rase monsieur quand il veut être propre pendant quelque temps.

— S’il veut être propre, c’est pour nous plaire apparemment, dit Régine ; mais dis-nous, petit ! cette moustache coupée prouve que, d’ici à quelque temps, ton maître ne compte pas sur la guerre, car cette lèvre bleuâtre ne serait pas d’ordonnance ?

— Ça prouve peut-être, répondit le groom, que monseigneur veut tenter un coup de main sans être