Page:Sand - Le Beau Laurence.djvu/70

Cette page n’a pas encore été corrigée

et revinrent à nous en criant comme des folles. Le prince se mit à rire du bout des lèvres, un peu surpris, un peu blessé ; mais il ne put les décider à rester dans un lieu si empreint de couleur locale. Il eut beau leur dire que des têtes de Turcs n’étaient pas des têtes humaines et qu’elles étaient desséchées par le vent, par conséquent fort propres ; elles déclarèrent qu’elles renonceraient au plaisir de voir la revue plutôt que de la voir en cette compagnie. Klémenti nous conduisit sur une autre tour, ce qui le contrariait un peu et le forçait à modifier son programme de spectacle, c’est-à-dire son plan de manœuvre ; puis il nous quitta, et nous le vîmes reparaître sur le pont-levis, piaffant et rutilant sur un magnifique cheval de montagne qui jetait du feu par toutes ses ouvertures, et qui semblait vouloir avaler tous les autres.

Le spectacle fut très-beau. L’armée se composait de deux cent cinquante hommes, mais quels hommes ! Ils étaient tous grands et maigres, élégants, bien costumés, armés jusqu’aux dents et cavaliers admirables. Leurs petits chevaux, hérissés et nerveux comme des chevaux cosaques, dévoraient le terrain. Ils exécutèrent plusieurs figures