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ces mots : La petite Jane à son professeur. Il porta le bouquet à ses lèvres en me regardant d’un air attendri, J’étais ivre de fierté. Mes petits cousins partageaient mon ivresse ; ils connaissaient l’acteur en renom, l’artiste applaudi, triomphant ! Ils avaient joué avec lui, ils l’avaient tutoyé, ils les avait appelés gravement : Mes chers camarades. On ne put les empêcher d’aller dans l’entr’acte l’embrasser dans les coulisses. Il leur remit pour moi une photographie qui le représentait dans son joli costume de Figaro, et il leur dit :

» — Vous conseillerez à votre cousine de regarder ce museau-là quand elle aura quelque petit chagrin, ça lui rendra l’envie de rire.

» Il était loin d’être grotesque dans ce rôle, et le hasard de la photographie l’avait encore flatté. Je la reçus avec orgueil, je la gardai avec un soin religieux ; non-seulement je ne le voyais plus laid, mais je le voyais beau.

» L’amour est plus précoce qu’on ne croit chez les jeunes filles. J’étais une enfant, j’ignorais le trouble des sens ; mais mon imagination était envahie par un type et mon cœur dominé par une préférence. Je n’en faisais pas mystère, j’étais trop in-