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ne m’aimerez jamais ; mais un homme qui se noie se rattrape jusqu’au dernier moment à tout ce qu’il peut saisir, et je vais entrer dans une existence qui est la mort intellectuelle, si je n’y porte pas un peu d’espoir. Ne trouvez donc pas inutile que je veuille me préparer à un naufrage peut-être pire que celui de l’Adriatique.

Impéria mit ses mains sur son visage et fondit en larmes.

— Je sais, lui dis-je en baisant ses mains mouillées, que vous avez de l’amitié, une véritable amitié pour moi.

— Oui, dit-elle, une amitié profonde, immense. Oui, Laurence, quand tu me dis que je ne t’aime pas, tu me fais un mal affreux. Je ne suis pas froide, je ne suis pas égoïste, je ne suis pas ingrate, je ne suis pas imbécile. Ton affection pour moi a été bien généreuse, tu ne me l’as jamais laissé voir que malgré toi, en de rares moments de fièvre et d’exaltation. Quand tu me l’as exprimée avec ardeur sur l’écueil, tu étais fou, tu étais mourant. Après, et presque toujours, tu l’as si bien renfermée et vaincue, que je l’ai cru absolument guéri. Je sais que tu as tout fait pour m’ou-