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passé depuis le jour où, émanation gazeuse du monde primitif, il est monté et descendu, remonté et redescendu, par d’innombrables voyages, de la terre au ciel et du ciel à la terre, pour occuper enfin cette petite place où je le vois ? Ruisseau qui fus nuage, qui nous dira tout ce que tu as fécondé dans ta vie errante ? Tes flancs ont sans doute plus d’une fois recélé le fluide électrique, et la foudre a déchiré tes masses livides un instant après répandues en franges roses sous le riant regard du soleil. Tu as vu passer dans le voile bienfaisant de tes épanchements humides les phalanges altérées des oiseaux voyageurs ; tu étais alors l’écho des hautes régions de l’atmosphère, et tu nous renvoyais, stridente ou plaintive, la voix de ces poétiques émigrants, agents eux-mêmes d’une fécondation sans limites. Pluie secourable, combien de moissons n’as-tu pas sauvées, combien de fleurs charmantes et suaves n’as-tu pas fait revivre ! combien d’existences humbles ou superbes n’as-tu pas conservées ou renouvelées ! Dans combien de poitrines n’as-tu pas fait rentrer