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relle, on les force à s’aider du discernement. Je ne te parle pas ici seulement des écrivains critiques, je parle de toi et de moi, je parle de nous tous qui, à toute heure de notre vie, sommes appelés à exercer notre jugement sur toutes les choses de la nature et de la civilisation. Nous sommes bien forcés alors de distinguer un vice d’une vertu, une ombre d’un rayon, une tache d’une beauté. Sans cela, nous n’aurions pas de raison pour admirer et apprécier quoi que ce soit. Que nous nous trompions tous et sans cesse, que les plus grands se trompent, que Voltaire, le roi de la critique, se soit trompé, peu importe, le fait ne prouve rien ; il faut que la critique soit, et Dieu a prononcé cette parole aussitôt après avoir dit le fiat lux de la poésie.

Il y a donc dans tout une part pour le blâme, et, si celle de l’indulgence doit se mesurer au mérite de l’homme, de l’œuvre ou de la chose, il n’en est pas moins vrai que tout ne doit pas être admiré sans discernement. Au reste, lorsque Victor Hugo dit : « J’accepte tout de la part de ceux qui sont grands, » le terme accepter n’est autre chose qu’une