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nuyait pas ; mais je n’osais plus lui adresser la parole et lui demander le secret de prendre plaisir à n’importe quelle occupation.

Au bout d’une quinzaine, elle quitta Fischausen pour Fischerburg, où elle devait demeurer avec sa gouvernante et une vieille cousine qui remplaçait sa mère. Je n’avais pas osé rompre la glace ; mais le coup avait porté, et je me mis à étudier avec ardeur, sans discuter, sans examiner, sans choisir et sans raisonner, tout ce qui entrait dans le programme tracé par l’oncle Tungsténius.

Étais-je amoureux ? Je ne le savais pas, et encore aujourd’hui je n’en suis pas certain. Mon amour-propre avait été cruellement froissé pour la première fois. Insensible jusque-là au dédain muet de mon oncle et aux railleries de mes condisciples, j’avais rougi de la pitié de Laura. Tous les autres étaient pour moi des radoteurs, elle seule m’avait semblé user d’un droit en me blâmant.

Un an plus tard, j’étais complètement transformé. Était-ce à mon avantage ? On le disait autour de moi, et, ma vanité aidant, j’avais très-bonne