Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/160

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et pourquoi mon oncle, au lieu de se contenter de la réalisation de ses pressentiments dans la limite du possible, s’obstinait à en poursuivre le côté chimérique. Je lui faisais part de mes réflexions à mes risques et périls, car il était devenu impérieux, fébrile, farouche, et je voyais bien qu’en cas de résistance ouverte, il n’hésiterait pas à se défaire de moi. Il me répondait à peine, ou, quand il daignait s’expliquer, c’était pour me reprocher amèrement mon manque de foi et l’épaississement volontaire de mes plus précieuses facultés.

Ce qui me frappa le plus dans la région que nous traversions, ce ne fut pas de rencontrer à chaque instant des espèces nouvelles dans tous les genres d’animaux, de plantes et de minéraux : je devais m’y attendre sous ces latitudes ; ce fut de les voir grandir en dimensions à mesure que nous marchions vers le nord, et ce fait, qui détruisait toutes mes notions rationnelles, ne pouvait s’expliquer que par l’augmentation rapide de la chaleur du climat. Néanmoins nous n’avions