Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/382

Cette page n’a pas encore été corrigée

vous soyez une intrigante habile, vous ne me ferez pas croire que le temps de votre retraite au couvent ait été très-saintement employé. Après une vie comme celle que vous meniez ici, après des jours et des nuits passés on ne sait où, je ne serais pas étonné que des raisons majeures ne vous eussent tout d’un coup forcée à vous cacher, et je présume que M. Féline, ayant fait fortune, est saisi aujourd’hui d’un remords de conscience ; car vous êtes tous fort pieux, lui, sa mère, vous, et la confidente, mademoiselle Parquet…

— Monsieur, dit Fiamma avec énergie, vous m’outragez et je ne le souffrirai pas, car vous n’en avez pas le droit. Dieu sait que vous n’avez aucun droit sur moi.

— J’en ai que vous ignorez, mademoiselle, et qu’il est temps de vous faire savoir, s’écria le comte hors de lui. J’ai le droit du bienfaiteur sur l’obligé, de celui qui donne sur celui qui reçoit ; j’ai le droit qu’un homme acquiert en subissant dans sa maison la présence d’un étranger et en l’y élevant par compassion. Ce droit, signora Carpaccio, le comte de Fougères l’a acquis en daignant nourrir la fille d’un bandit et d’une…

— Et d’une femme parfaite, indignement sacrifiée à un misérable tel que vous, répondit Fiamma d’un air et d’un ton qui forcèrent le comte à se rasseoir. Puisque vous savez tout, monsieur le comte, sachez bien que, de mon côté, je n’ignore rien, et je vais vous le prouver. Restez ici ; ne bougez pas, ne m’interrompez pas, je vous le défends ! La mémoire de ma mère est sacrée pour moi. N’espérez pas la flétrir à mes yeux, ni me faire rougir de devoir le jour à un chef de partisans, à un héros qui est mort pour sa patrie, et dont je suis plus fière que de vos ancêtres, dont une loi absurde et impie me force de porter le nom. Bianca Faliero, de la race ducale de Venise, et Dionigi Carpaccio, paysan des Alpes, défenseur