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de finir toutes ses dissertations par ces trois mots : Non è vero, Fiamma ?

Lorsqu’il vit le marquis d’Asolo si brusquement éconduit, il entra dans un de ces accès de violence dont les gens du dehors ne l’eussent jamais cru capable, mais devant lesquels sa maison avait souvent l’occasion de trembler. Il appela sa fille au moment où le cousin s’éloignait de Fougères dans sa chaise de poste, tandis que Fiamma prenait naturellement le chemin de la maison Féline ; alors, la priant de remonter dans sa chambre, il l’y suivit, et en ferma les fenêtres et les portes pour que l’explosion de sa colère ne se fît pas entendre au loin.

Fiamma avait prévu cette éruption volcanique. Elle la contempla avec une insensibilité apparente, quoique une fureur profonde embrasât les secrets replis de son âme orgueilleuse. Quand le comte eut frappé sur la table (sans pourtant s’oublier lui-même jusqu’à la briser) ; quand il eut lancé autour de lui les éclairs de ses petits yeux bridés, et qu’il lui eut intimé, dans les termes les plus blessants qu’il pût trouver, l’ordre d’entrer dans un couvent ou de cesser toute relation avec la famille Féline, elle le pria avec un sang-froid cruel de modérer son emportement, dans la crainte, lui dit-elle, d’un de ces accès de toux nerveuse auxquels il était sujet ; puis, s’asseyant de manière à ne pas friper sa robe et à conserver dans leur liberté tous les mouvements de son corps, elle lui répondit ainsi dans le plus pur toscan, avec cette gesticulation noble et avec cet accent sonore et un peu ampoulé des Vénitiens lorsqu’ils quittent leur dialecte rapide et serré :

« Il me semble que l’objet de cette décision a déjà été discuté entre nous au printemps dernier, et que nous avons pris des conclusions à cet égard. Votre Seigneurie les aurait-elle oubliées, ou bien me serais-je écartée des