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— Bah ! me dit-elle avec un air demi-étonné, demi-indifférent.

Je lui montrai le paquet que j’avais reçu. Il était de Nasi. Il contenait deux lettres de faire-part, deux autres lettres autographes, l’une de Nasi pour elle, l’autre d’Alezia pour moi, charmantes toutes deux.

— Tu vois, repris-je lorsque Checca eut fini de lire, que nous n’avons pas à nous plaindre de leurs procédés. Ce paquet nous a cherchés à Florence et à Milan, et s’il ne nous est parvenu qu’ici, c’est la faute de nos voyages. Ces lettres sont, du reste, aussi bienveillantes et aussi agréables que possible. On reconnaît aisément qu’elles ont été écrites par de nobles cœurs. Tout grands seigneurs qu’ils sont, ils ne craignent pas de nous parler, l’un de son amitié, l’autre de sa reconnaissance.

— Oui, mais en attendant ils ne nous invitent pas à leurs noces.

— D’abord, ils ne nous savent pas ici ; et puis ensuite, ma pauvre sœur, les nobles et les riches n’invitent les chanteurs à leurs réunions que pour les faire chanter ; et ceux qui ne veulent pas chanter pour amuser les amphitryons, on ne les invite pas du tout. C’est là la justice du monde ; et, tout bons et tout raisonnables que sont nos deux jeunes amis, vivant dans ce monde, ils sont obligés de se soumettre à ses lois.

— Ma foi ! tant pis pour eux, mon brave Lélio ! Qu’ils s’arrangent. Ils nous laissent nous amuser sans eux ; laissons-les s’ennuyer sans nous. Narguons l’orgueil des grands, rions de leurs sottises, dépensons gaiement la richesse quand nous l’avons, recevons sans souci la pauvreté si elle vient ; sauvons avant tout notre liberté, jouissons de la vie quand même, et vive la Bohême ! »

Là finit le récit de Lélio. Quand il eut cessé de parler,