Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/136

Cette page n’a pas encore été corrigée

Ah ! si vous pouviez la décider à épouser un jeune comte qui l’a demandée en mariage dernièrement !…

— Le comte Hector, son cousin ?

— Oh ! non ! celui-là est un sot, et il ennuie tout le monde ; jusqu’à ses chiens qui bâillent dès qu’ils l’aperçoivent.

Tout en écoutant le babil de Lila, que mes manières paternelles avaient complètement mise à l’aise, je l’entraînais vers le lieu du rendez-vous. Ce n’est pas que je ne l’écoutasse avec beaucoup d’intérêt ; tous ces détails, puérils en apparence, étaient fort importants à mes yeux ; car ils me conduisaient par induction à la connaissance de l’énigmatique personnage à qui j’avais affaire. Il faut avouer aussi qu’ils refroidissaient beaucoup mon ardeur, et que je commençais à trouver bien ridicule d’être le héros d’une passion en concurrence avec le premier jouet venu, avec mon chat Soliman, et qui sait ? peut-être avec le cousin Hector lui-même au premier jour. Les conseils de Lila étaient donc précisément ceux que je me donnais à moi-même et que j’avais le plus envie de suivre.

Nous trouvâmes la signora assise au pied de la colonne et toute vêtue de blanc, costume assez peu d’accord avec le mystère d’un rendez-vous en plein air, mais par cela même très conforme à la logique de son caractère. En me voyant approcher, elle demeura tellement immobile, qu’on l’eût prise pour une statue placée aux pieds de la nymphe de marbre blanc.

Elle ne répondit rien à mes premières paroles. Le coude appuyé sur son genou et le menton dans sa main, elle était si rêveuse, si noblement posée, si belle, drapée dans son voile blanc au clair de la lune, que je l’eusse crue livrée à une contemplation sublime, sans l’amour du chat et celui du blason qui me revenaient en mémoire.

Comme elle me semblait décidée à ne pas faire attention