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audace elle était frappée d’épouvante. Je n’osais la rassurer par des paroles tendres ; car je la savais prompte à la repartie ironique, et je ne prévoyais pas quel ton elle prendrait avec moi en cette circonstance délicate. Je comprenais seulement que plus elle s’exposait avec moi, plus je devais me montrer respectueux et soumis. Avec un caractère comme le sien, l’impudence eût été promptement repoussée par le mépris. Enfin, je vis qu’il fallait le premier rompre le silence, et je la remerciai assez gauchement de la faveur de cette entrevue. Ma timidité sembla lui rendre le courage. Elle souleva doucement le coin de son voile, appuya son bras avec plus d’aisance sur le bois du confessionnal, et me dit d’un ton demi-railleur, demi-attendri :

— De quoi me remerciez-vous, s’il vous plaît ?

— D’avoir compté sur ma soumission, madame, répondis-je ; de n’avoir pas douté de l’empressement avec lequel je viendrais recevoir vos ordres.

— Ainsi, reprit-elle en raillant tout à fait, votre présence ici est un acte de pure soumission ?

— Je n’oserais pas me permettre de rien penser sur ma situation présente, sinon que je suis votre esclave, et qu’ayant une volonté souveraine à me manifester, vous m’avez commandé de venir m’agenouiller ici.

— Vous êtes un homme parfaitement élevé, répondit-elle en dépliant lentement son éventail devant son visage et en remontant sa mitaine noire sur son bras arrondi, avec autant d’aisance que si elle eût parlé à son cousin.

Elle continua sur ce ton, et, en très peu d’instants, je fus obsédé et presque attristé de son babil fantastique et mutin. « À quoi bon, me disais-je, tant d’audace pour si peu d’amour ! Un rendez-vous dans une église, à la vue de toute une population, le danger d’être découverte,