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qu’il a étrangement méconnu et faussé la vérité dans sa République. Lis donc Trismégiste et Platon, et ceux qui ont médité après eux sur le grand mystère. Dans ce nombre, je te recommande le noble moine Campanella, qui souffrit d’horribles tortures pour avoir rêvé ce que tu rêves, l’organisation humaine fondée sur la vérité et la science. »

Nous écoutions en silence.

« Quand je vous parle de livres, continua Trismégiste, ne croyez pas que, comme les catholiques, j’incarne idolâtriquement la vie dans des tombeaux. Je vous dirai des livres ce que je vous disais hier d’autres monuments du passé. Les livres, les monuments sont des débris de la vie dont la vie peut et doit se nourrir. Mais la vie est toujours présente, et l’éternelle Trinité est mieux gravée en nous et au front des étoiles que dans les livres de Platon ou d’Hermès. »

Sans le vouloir, je fis tourner la conversation un peu au hasard.

« Maître, lui dis-je, vous venez de vous exprimer ainsi : la Trinité est mieux gravée au front des étoiles… Qu’entendez-vous par là ? Je vois bien, comme dit la Bible, la gloire de Dieu reluire dans l’éclat des astres, mais je ne vois pas dans les astres une preuve de la loi générale de la vie que vous appelez Trinité.

— C’est, me répondit-il, que les sciences physiques sont encore trop peu avancées, ou plutôt, c’est que tu ne les as pas étudiées au point où elles sont aujourd’hui. As-tu entendu parler des découvertes sur l’électricité ? Sans doute, car elles ont occupé l’attention de tous les hommes instruits. Eh bien, n’as-tu pas remarqué que les savants si incrédules, si railleurs, quand il s’agit de la Trinité divine, en sont venus, à propos de ces phénomènes, à reconnaître la Trinité ? car ils disent eux-