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ture ? Dieu n’a-t-il pas révélé à l’Humanité quelque chose de plus ?

— Les chrétiens disent que Dieu est trois personnes en un, le Père, le Fils, l’Esprit.

— Et que disent les traditions des anciennes sociétés secrètes que tu as consultées ?

— Elles disent la même chose.

— Ce rapport ne t’a-t-il pas frappé ? Religion officielle et triomphante, religion secrète et proscrite, s’accordent sur la nature de Dieu. Je pourrais te parler des cultes antérieurs au Christianisme : tu trouverais, cachée dans leur théologie, la même vérité. L’Inde, l’Égypte, la Grèce, ont connu le Dieu un en trois personnes ; mais nous reviendrons sur ce point. Ce que je veux te faire comprendre maintenant, c’est la formule dans toute son extension, sous toutes ses faces, pour arriver à ce qui t’intéresse, la méthode, l’organisation, la politique. Je continue. De Dieu, passons à l’homme. Qu’est-ce que l’homme ?

— Après une question difficile, tu m’en poses une qui ne l’est guère moins. L’oracle de Delphes avait déclaré que toute sagesse consistait dans la réponse à cette question : Homme, connais-toi toi-même.

— Et l’oracle avait raison. C’est de la nature humaine bien comprise que sort toute sagesse, comme toute morale, toute organisation, toute vraie politique. Permets donc que je te répète ma question. Qu’est-ce que l’homme ?

— L’homme est une émanation de Dieu…

— Sans doute, comme tous les êtres qui vivent, puisque Dieu seul est l’Être, l’Être absolu. Mais tu ne ressembles pas, je l’espère, aux philosophes que j’ai vus en Angleterre, en France, et aussi en Allemagne, à la cour de Frédéric. Tu ne ressembles pas à ce