Page:Sand - La comtesse de Rudolstadt, 2e série.djvu/280

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
276

succession litigieuse. Elle dut le faire, et se contenter de la succession de son père, qui se trouva fort réduite par les frais énormes qu’elle eut à payer pour un procès auquel on l’avait contrainte. Enfin le château et les terres de Riesenburg furent confisqués au profit de l’État, quand les avocats, les gérants, les juges et les rapporteurs eurent prélevé sur cette dépouille des hypothèques montant aux deux tiers de sa valeur.

Tel est notre commentaire sur ce mystérieux procès qui dura cinq ou six ans, et à la suite duquel Albert fut chassé des États autrichiens comme un dangereux aliéné, par grâce spéciale de l’impératrice. À partir de cette époque, il est à peu près certain qu’une vie obscure et de plus en plus pauvre fut le partage des deux époux. Ils reprirent leurs plus jeunes enfants avec eux. Haydn et le chanoine refusèrent tendrement de leur rendre les aînés, qui faisaient leur éducation sous les yeux et aux frais de ces fidèles amis. Consuelo avait irrévocablement perdu la voix. Il paraît trop certain que la captivité, l’inaction et la douleur des maux qu’éprouvait sa compagne avaient de nouveau ébranlé la raison d’Albert. Il ne paraît cependant point que leur amour en fût devenu moins tendre, leur âme moins fière et leur conduite moins pure. Les Invisibles avaient disparu sous la persécution. L’œuvre avait été ruinée, surtout par les charlatans qui avaient spéculé sur l’enthousiasme des idées nouvelles et l’amour du merveilleux. Persécuté de nouveau comme franc-maçon dans les pays d’intolérance et de despotisme, Albert dut se réfugier en France ou en Angleterre. Peut-être y continua-t-il sa propagande ; mais ce dut être parmi le peuple, et ses travaux, s’ils portèrent leurs fruits, n’eurent aucun éclat.

Ici il y a une grande lacune, à laquelle notre imagi-