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France, l’Espagne, l’Angleterre et l’Italie ? Il n’y en eut point de manifeste pour le monde, et je crois qu’il faut se reporter à vingt ans plus tard pour retrouver, par induction, l’action des sociétés secrètes dans l’histoire du dix-huitième siècle. Ces sociétés eurent-elles plus d’effet en France que dans le sein de l’Allemagne qui les avait enfantées ? La Révolution française répond avec énergie par l’affirmative. Cependant la conspiration européenne de l’illuminisme et les gigantesques conceptions de Weishaupt montrent aussi que le divin rêve du saint Graal n’avait pas cessé d’agiter les imaginations allemandes, depuis trente années, malgré la dispersion ou la défection des premiers adeptes.

D’anciennes gazettes nous apprennent que la Porporina chanta avec un grand éclat à Paris dans les opéras de Pergolèse, à Londres dans les oratorios et les opéras de Hændel, à Madrid avec Farinelli, à Dresde avec la Faustina et la Mingotti ; à Venise, à Rome et à Naples, dans les opéras et la musique d’église du Porpora et des autres grands maîtres.

Toutes les démarches d’Albert nous sont inconnues. Quelques billets de Consuelo à Trenck ou à Wanda nous montrent ce mystérieux personnage plein de foi, de confiance, d’activité, et jouissant, plus qu’aucun autre homme, de la lucidité de ses pensées jusqu’à une époque où les documents certains nous manquent absolument. Voici ce qui a été raconté, dans un certain groupe de personnes à peu près toutes mortes aujourd’hui, sur la dernière apparition de Consuelo à la scène.

Ce fut à Vienne vers 1760. La cantatrice pouvait avoir environ trente ans ; elle était, dit-on, plus belle que dans sa première jeunesse. Une vie pure, des habitudes de calme moral et de sobriété physique, l’avaient conservée dans toute la puissance de sa grâce et de son talent. De