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casque, on lisait, en caractères incisés dans le métal, ces mots en langue espagnole :

Vive la sainte inquisition !

Et au-dessous, une prière qui semblait dictée par une compassion féroce, mais qui était peut-être sortie du cœur et de la main du pauvre ouvrier condamné à fabriquer cette infâme machine :

Sainte mère de Dieu, priez pour le pauvre pêcheur !

Une touffe de cheveux, arrachée dans les tourments, et sans doute collée par le sang, était restée au-dessous de cette prière, comme des stigmates effrayants et indélébiles. Ils sortaient par un des trous, qu’avait élargi le stylet. C’étaient des cheveux blancs !

Tout à coup, Consuelo ne vit plus rien et cessa de souffrir. Sans être avertie par aucun sentiment de douleur physique, car son âme et son corps n’existaient plus que dans le corps et l’âme de l’humanité violentée et mutilée, elle tomba droite et raide sur le pavé comme une statue qui se détacherait de son piédestal ; mais au moment où sa tête allait frapper le bronze de l’infernale machine, elle fut reçue dans les bras d’un homme qu’elle ne vit pas. C’était Liverani.


XL.

En reprenant connaissance, Consuelo se vit assise sur des tapis de pourpre, qui recouvraient les degrés de marbre blanc d’un élégant péristyle corinthien. Deux

    chots du Saint-Office et des plombs du palais ducal, n’ont été livrés à l’exament du public, à l’intérieur, qu’à l’entrée des Français à Venise, lors des guerres de la république.