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italienne ; et lorsque le sujet fut épuisé, il s’écria tout d’un coup :

« Ah ! signora Porporina, une nouvelle que j’oubliais de vous dire, et qui va vous faire plaisir certainement : votre ami, le baron de Trenck, n’est plus prisonnier.

— Quel baron de Trenck, Sire ? demanda la jeune fille avec une habile candeur : j’en connais deux, et tous deux sont en prison.

— Oh ! Trenck le Pandoure périra au Spielberg. C’est Trenck le Prussien qui a pris la clef des champs.

— Eh bien, Sire, répondit la Porporina, pour ma part, je vous en rends grâces. Votre Majesté a fait là un acte de justice et de générosité.

— Bien obligé du compliment, Mademoiselle. Qu’en pensez-vous, ma chère sœur ?

— De quoi parlez-vous donc ? dit la princesse. Je ne vous ai pas écouté, mon frère, je commençais à m’endormir.

— Je parle de votre protégé, le beau Trenck, qui s’est enfui de Glatz par-dessus les murs.

— Ah ! Il a bien fait, répondit Amélie avec un grand sang-froid.

— Il a mal fait, reprit sèchement le roi. On allait examiner son affaire, et il eût pu se justifier peut-être des charges qui pèsent sur sa tête. Sa fuite est l’aveu de ses crimes.

— S’il en est ainsi, je l’abandonne, dit Amélie, toujours impassible.

— Mademoiselle Porporina persisterait à le défendre, j’en suis certain, reprit Frédéric ; je vois cela dans ses yeux.

— C’est que je ne puis croire à la trahison, dit-elle.

— Surtout quand le traître est un si beau garçon ? Savez-vous, ma sœur, que mademoiselle Porporina est très-liée avec le baron de Trenck ?