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« Je t’avais dit de te méfier de M. de Saint-Germain, lui dit-il ; mais il était trop tard. Chaque parti a ses traîtres. N’en sois pas moins fidèle à l’amitié et docile à la voix de ta conscience. Tu es protégée par un bras plus puissant que celui qui t’opprime.

— Que veux-tu dire ? s’écria la Porporina ; es-tu de ceux…

— Je dis que Dieu te protégera », répondit le Porporino, qui semblait craindre d’avoir été entendu, et il lui montra la cloison qui séparait les loges d’acteurs les unes des autres. Ces cloisons avaient dix pieds de haut, mais elles laissaient entre leur sommité et le plafond commun un espace assez considérable, de sorte qu’on pouvait facilement entendre d’une loge à l’autre ce qui se passait.

« J’ai prévu, lui dit-il en parlant encore plus bas et en lui remettant une bourse, que tu aurais besoin d’argent, et je t’en apporte.

— Je te remercie, répondit Consuelo ; si le gardien, qui me vend chèrement les vivres, venait te réclamer quelque paiement, comme voici de quoi le satisfaire pour longtemps, refuse de solder ses comptes. C’est un usurier.

— Il suffit, répliqua le bon et loyal Porporino. Je te quitte j’aggraverais ta position si je paraissais avoir des secrets avec toi. »

Il s’esquiva, et Consuelo reçut la visite de madame de Cocceï (la Barberini), qui lui témoigna courageusement beaucoup d’intérêt et d’affection. La marquise d’Argens (la Cochois) vint les rejoindre d’un air plus empesé, et avec les belles paroles d’une reine qui protège le malheur. Consuelo ne lui en sut pas moins de gré de sa démarche, et la supplia de ne pas compromettre la faveur de son époux en prolongeant sa visite.

Le roi dit à Pœlnitz :